Après l’impressionnant incendie qui a détruit partiellement quatre habitations à Wattrelos, les habitants du quartier du Nouveau-Monde pointent un défaut d’infrastructure : une unique borne incendie pour toute la rue. Les autorités municipales s’en défendent, invoquant les normes actuelles et la topographie particulière du secteur.

Un sinistre rare dans un secteur rural
Le hameau du Nouveau-Monde, connu pour sa tranquillité à la lisière de la frontière belge, a été le théâtre dimanche d’un violent incendie ayant mobilisé des moyens exceptionnels. Le feu, dont l’origine reste à déterminer, s’est propagé rapidement, éventrant les toitures de trois maisons contiguës, rendant ces dernières inhabitables.
La mobilisation des secours a été massive : une cinquantaine de pompiers venus de plusieurs casernes françaises — Roubaix, Lille, Tourcoing — ainsi que des collègues belges d’Estaimpuis sont intervenus. Malgré cette réactivité, les flammes avaient déjà dévasté une partie importante de la rue.
Le sinistre n’a fait aucun blessé, mais les dégâts matériels sont considérables. Trois familles ont dû être relogées en urgence.
Une seule borne incendie dans la rue
Le point de crispation vient d’un détail logistique crucial : une seule borne incendie est disponible dans l’impasse du Nouveau-Monde, une configuration dénoncée par plusieurs riverains.
« Les pompiers ont perdu de précieuses minutes à tirer des tuyaux sur une longue distance. Une seule maison aurait brûlé si la borne n’avait pas été aussi loin », estime un habitant, encore sous le choc.
La rue, en impasse, complique l’accès pour les véhicules d’intervention lourds. Pour installer la grande échelle, les secours ont dû démonter du mobilier urbain, ce qui a encore rallongé l’intervention.
Réponse de la municipalité
Face aux critiques, la mairie de Wattrelos assure que le dispositif en place respecte les normes nationales. Henri Gadaut, adjoint à la sécurité, rappelle que l’implantation des bouches à incendie suit des règles précises :
« Le nombre de bornes est en rapport avec la densité d’habitation. Nous ne sommes pas dans une zone urbaine dense, mais dans un hameau à l’habitat dispersé. Les pompiers connaissent ce type de configuration et s’adaptent. »
Selon le service départemental d’incendie et de secours (SDIS), les règles imposent une borne incendie tous les 200 mètres dans les zones urbaines, mais des aménagements sont possibles dans les secteurs ruraux ou en impasse.
Une intervention transfrontalière saluée
Un point a toutefois été unanimement salué : la coopération avec les pompiers belges. La caserne d’Estaimpuis, à quelques kilomètres à vol d’oiseau, a envoyé une équipe dès l’apparition des premières fumées, visibles à plusieurs kilomètres.
« Le capitaine belge n’a pas attendu d’appel. Il a vu la fumée et a tout de suite engagé ses équipes. Cela a été déterminant pour limiter la propagation », souligne Henri Gadaut.
Cette réactivité s’explique par une convention de coopération signée entre le SDIS du Nord et les autorités belges, autorisant les interventions mutuelles au-delà de la frontière. Une démarche rare mais de plus en plus valorisée dans les zones transfrontalières.
Une réévaluation à venir du réseau incendie
Dans les jours qui ont suivi l’incendie, plusieurs voix ont appelé à une réévaluation du réseau de sécurité incendie dans les hameaux et lotissements excentrés.
Le maire de Wattrelos, contacté en marge d’un point presse, a indiqué que « des vérifications seraient menées sur la couverture actuelle en bouches incendie », sans pour autant s’engager à de nouvelles installations.
Du côté des pompiers, on rappelle que les moyens mobiles — citernes, motopompes, camions grande capacité — permettent souvent de compenser l’absence de bornes à proximité immédiate. Mais les professionnels reconnaissent que chaque minute compte lors d’une intervention, et que les aménagements urbains peuvent constituer un frein.
Des habitants encore sous le choc
Sur place, les riverains sont partagés entre la reconnaissance envers les secours et la frustration d’un sinistre qu’ils estiment partiellement évitable.
« Ce n’est pas la première fois qu’on alerte sur cette borne unique. On nous répond que ça suffit, mais les faits montrent le contraire », déplore une résidente voisine.
Le relogement des familles concernées a été pris en charge par la municipalité avec l’appui d’organismes sociaux. Une enquête est en cours pour déterminer l’origine exacte du feu, probablement accidentelle selon les premières constatations.
Contexte : normes et réalités du terrain
En France, les normes relatives aux points d’eau incendie (PEI) sont définies par le règlement départemental de défense extérieure contre l’incendie (DECI). Ce document, propre à chaque département, établit les distances minimales, les débits exigés et les obligations des collectivités. Dans les zones périurbaines et rurales, la fréquence des bornes peut être allégée, à condition que les services de secours soient en mesure de compenser par d’autres moyens.
La topographie, l’état des voiries et l’accès aux réseaux jouent aussi un rôle. Le cas du Nouveau-Monde, à la croisée entre zone rurale et tissu pavillonnaire, illustre les limites de ces modèles hybrides.
Perspectives : vers une adaptation du maillage ?
Le sinistre de Wattrelos relance une question plus large sur l’adéquation entre l’urbanisation diffuse et les infrastructures de sécurité. Si les normes actuelles sont respectées, leur pertinence dans certains contextes fait débat. La multiplication des lotissements en bordure de villes, souvent en impasse ou dans des zones peu desservies, appelle peut-être une adaptation des dispositifs.
Le SDIS du Nord pourrait, à l’avenir, inclure de telles zones dans ses simulations de risques afin de préconiser des ajustements. Une étude technique sera menée dans les semaines à venir pour évaluer la couverture incendie dans les hameaux de la commune.
En attendant, au Nouveau-Monde, les stigmates de l’incendie restent visibles, et avec eux, les interrogations d’un quartier encore marqué par une soirée de cauchemar.