Surbooking, hôtel déplacé et désillusions : le voyage vire au casse-tête pour des vacanciers français
Environ 80 touristes français ont vu leur séjour bouleversé dès leur arrivée à Agadir, au Maroc. Prévu dans un hôtel calme de Taghazout, leur hébergement a été remplacé à la dernière minute par un établissement situé en centre-ville. Une vacancière du Pas-de-Calais dénonce une gestion confuse et un manque de transparence de la part du tour-opérateur Ôvoyages.

Une arrivée sous tension
À leur descente d’avion à Agadir, ces touristes français s’attendaient à une semaine de repos dans un cadre paisible. L’hôtel réservé : le White Beach Resort de Taghazout, un établissement 5 étoiles réputé pour son calme, en bord de mer, à une trentaine de kilomètres de la ville. Pourtant, une toute autre réalité les attendait.
« Dès l’aéroport, on nous annonce que nous allons dans un autre hôtel. On nous parle de surclassement, mais sans pouvoir nous expliquer clairement pourquoi », raconte Manolyn Drelon, originaire de Billy-Berclau, dans le Pas-de-Calais. Très vite, le doute s’installe : leurs bagages sont placés dans un bus, direction Agadir même, et aucune alternative ne leur est proposée.
« On nous ment en nous disant qu’on est surclassés. Nos valises sont mises dans le bus et on nous pousse à nous installer au plus vite. »
Manolyn Drelon, vacancière française
D’un village tranquille à une station urbaine animée
Le nouvel hôtel proposé, bien qu’affichant également cinq étoiles, appartient à la même chaîne Pickalbatros. Mais il est situé dans le centre animé d’Agadir, une ville de plus de 500 000 habitants. Une situation qui contraste fortement avec l’ambiance sereine promise à Taghazout.
Les vacanciers découvrent un établissement bruyant, en pleine zone touristique, avec des travaux non terminés et un accès à la plage limité : un petit carré de vingt transats dans une zone très fréquentée.
« C’est une station balnéaire bondée, l’inverse de ce qu’on avait réservé. On s’est sentis piégés. »
Un autre touriste, souhaitant rester anonyme
Face à cette situation, une vingtaine de voyageurs décide de se rendre eux-mêmes à Taghazout, à leurs frais. Sur place, le personnel du White Beach confirme que l’hôtel est complet. Les chambres avaient pourtant été réservées plusieurs mois à l’avance par Ôvoyages.
Ôvoyages rejette la responsabilité sur l’hôtel
Interrogée sur cette affaire, Samia Benslimane, directrice générale d’Ôvoyages, exprime son incompréhension : « Les chambres avaient bien été garanties et réglées à l’avance. Nous avons été les premiers surpris. »
Elle évoque un dysfonctionnement technique du côté de l’hôtel. « Il y aurait eu un problème informatique, et les personnes responsables auraient été licenciées. Nous travaillons avec cette chaîne depuis quatre ans et c’est la première fois que cela arrive. »
« Les chambres concernées avaient bien été garanties et réglées à l’avance. C’est un dysfonctionnement qui vient de l’hôtel. »
Samia Benslimane, directrice générale d’Ôvoyages
Mais pour les clients, la pilule passe mal. Entre 1 600 et 2 500 euros déboursés pour une prestation qui ne correspond ni au lieu, ni à l’ambiance promise. Le geste commercial proposé par Ôvoyages est jugé insuffisant par plusieurs vacanciers.
Un incident qui n’est pas isolé
Selon plusieurs témoignages, une cinquantaine d’autres touristes avaient déjà vécu une situation similaire la semaine précédente. Là encore, le White Beach Resort n’a pas pu accueillir les vacanciers, redirigés vers un autre hôtel à Agadir. Le scénario semble se répéter.
Le phénomène de surbooking — pratique courante dans l’hôtellerie et le transport aérien — consiste à vendre plus de places qu’il n’en existe réellement, en pariant sur les annulations. Mais dans le secteur du tourisme, il peut vite tourner au cauchemar pour les clients.
« Ce n’est pas seulement une erreur logistique, c’est un abus de confiance. Nous avons tous signé un contrat. »
Un touriste rencontré sur place
Quelle issue pour les clients ?
À ce jour, aucun remboursement intégral n’a été confirmé. Certains clients envisagent une action collective pour obtenir réparation, tandis que d’autres attendent toujours une réponse claire de la part du tour-opérateur. Plusieurs d’entre eux ont déjà saisi leur assurance voyage ou contacté des associations de consommateurs.
La direction d’Ôvoyages affirme avoir mis en place un service dédié pour traiter les réclamations. « Chaque dossier sera examiné individuellement, en fonction de la situation vécue par chaque client », assure la société.
Un été sous pression pour le tourisme
Cet incident survient dans un contexte où les voyages à l’étranger connaissent un net regain depuis la levée des restrictions sanitaires. Les destinations comme le Maroc, accessibles en quelques heures de vol, attirent de nombreux Français.
Face à cette forte demande, les tour-opérateurs et les hôtels doivent jongler avec des plannings très chargés. Mais pour les clients, ce regain d’activité ne saurait justifier une dégradation du service.
Pour l’instant, les touristes concernés rentrent avec des souvenirs amers de leur séjour. Plusieurs d’entre eux ont déjà décidé qu’ils ne referont pas appel à Ôvoyages.
« On part en vacances pour se reposer, pas pour se battre pour ce qu’on a payé. »
Manolyn Drelon, vacancière
Vers une meilleure régulation du surbooking ?
L’affaire relance le débat sur le surbooking touristique. Si la pratique est légale, elle reste encadrée en France par le Code du tourisme, qui impose aux agences de voyages de proposer une prestation équivalente ou supérieure en cas de problème. Encore faut-il que cela corresponde réellement aux attentes des voyageurs.
Les associations de consommateurs appellent à une vigilance accrue sur ces pratiques. Selon UFC-Que Choisir, « trop de voyageurs se retrouvent seuls face à des prestataires qui se renvoient la responsabilité. »
Une enquête pourrait être ouverte si plusieurs plaintes sont déposées auprès de la DGCCRF (Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes). De leur côté, les touristes attendent des réponses claires. Et, au minimum, un dédommagement à la hauteur de leur déconvenue.