Portée par deux figures du quartier, l’ARIB entend jouer un rôle de relais entre les habitants de la Bourgogne et les autorités locales, en pleine transformation du paysage urbain.

Un espace d’écoute dans un quartier en mutation
Dans le quartier de la Bourgogne, à Tourcoing, les pelleteuses, échafaudages et barrières de chantier ne passent pas inaperçus. La transformation est en marche, portée par un ambitieux programme de rénovation urbaine de plus de 400 millions d’euros. Mais derrière les chiffres, ce sont des habitants, des parcours de vie, et parfois des angoisses que l’Association représentative des intérêts de la Bourgogne (ARIB) entend porter à la connaissance des décideurs. Créée récemment à l’initiative de deux co-présidents de comité de quartier, Abdel Hani et Marie-Odile Vautrin, l’ARIB veut être un point d’ancrage pour les résidents du secteur.
Une initiative née d’un besoin de relais
Le projet de rénovation urbaine n’en est pas à ses débuts. Depuis plusieurs années, le quartier est au centre d’une reconfiguration profonde. Mais face aux mutations rapides, la nécessité d’un relais humain, local, s’est imposée comme une évidence pour les fondateurs de l’ARIB.
« L’objectif est de faire la liaison entre nous, les habitants, qui sommes au cœur du quartier, et la politique de la ville, pour que les réactions soient plus rapides, dans la foulée. Comme nous sommes en bons termes avec les élus, cela ne peut être que positif. »
— Abdel Hani, président de l’ARIB
En parallèle des démarches administratives, le vécu des résidents mérite une attention particulière. L’association veut s’en faire l’écho, en agissant comme intermédiaire mais aussi comme soutien dans une période où les repères changent.
« Quand on leur propose un nouveau logement, certaines personnes sont un peu intimidées. Parfois, cela ne leur convient pas mais elles n’osent pas dire non, de peur qu’on ne leur propose rien d’autre, et se sentent sous pression. »
— Marie-Odile Vautrin, secrétaire de l’ARIB
Un rôle complémentaire au comité de quartier
Abdel Hani et Marie-Odile Vautrin ne sont pas inconnus dans le quartier : en tant que co-présidents du comité de quartier, ils agissent déjà au contact direct des habitants. Toutefois, l’ARIB se veut plus spécifique, en se concentrant sur les aspects humains de la transformation urbaine.
« Il va falloir créer un point de rencontre et d’écoute pour les habitants, qui ont besoin de partager leurs sentiments. La rénovation urbaine, ça va se faire, on est obligés d’en passer par là, mais pour certains c’est dramatique. »
— Marie-Odile Vautrin
« Le but de cette association, c’est le social, en dehors de la politique. On travaille humainement, on rapporte tout. On est toujours à l’écoute des habitants, en travaillant main dans la main avec la ville. »
— Abdel Hani
Un quartier en pleine redéfinition
L’identité du quartier, fortement marquée par un tissu social dense et ancien, est aujourd’hui remise en question. Le départ de familles, la reconstruction de logements, l’implantation de nouveaux équipements comme une halle commerciale ou une école, reconfigurent progressivement la vie locale.
« On était une famille, aujourd’hui on se retrouve isolés. On va au contact des jeunes, on est comme des médiateurs et l’avantage c’est qu’ils nous écoutent. On est respectés. »
— Abdel Hani
Le lien social se fragilise, les repères évoluent, et la crainte d’un effacement du passé hante certains riverains. Pour autant, une partie des habitants accueille favorablement les changements, notamment ceux qui ont déménagé dans de meilleures conditions.
« Parmi les gens qui partent, certains sont contents, c’est vrai. D’autres regrettent aussi et veulent revenir. Même s’ils sont bien ailleurs, dans des maisons avec jardin, ils préfèrent l’ambiance ici. »
— Marie-Odile Vautrin
Une ambition portée par l’expérience du terrain
La naissance de l’ARIB intervient dans un contexte de meilleure lisibilité des intentions de la municipalité. Si l’inquiétude reste palpable, le dialogue avec les élus semble se renforcer.
« Aujourd’hui, cela s’améliore. On est à l’approche des municipales, il faut être diplomate, réaliste et aller de l’avant pour trouver un chemin qui mène tout le monde vers le succès. »
— Abdel Hani
Cette diplomatie locale, les fondateurs de l’association veulent la construire sur la durée, en se concentrant sur l’accompagnement humain. Cela inclut aussi une prise de parole sur des décisions passées, perçues comme brutales ou précipitées.
« C’est beaucoup d’argent mais les bailleurs ont tout de même laissé tomber des logements dont l’entretien n’était pas fait comme il faut… Avec la crise du logement, on n’aurait pas dû tout démolir, ou alors un peu à la fois. »
— Marie-Odile Vautrin
Une transition sous tension
Avec plus de 400 millions d’euros investis dans le projet de renouvellement urbain, les ambitions sont élevées. Toutefois, la réussite ne se mesure pas uniquement à l’aune des infrastructures réalisées, mais aussi à l’acceptation des changements par les habitants.
« On est bousculés par les changements, quand même. Je pense qu’il y aura une autre identité dans le quartier. »
— Marie-Odile Vautrin
« On verra, à long terme, ce que cela va donner. C’est un petit peu inquiétant. C’est la volonté de la ville de faire tous ces changements mais est-ce qu’elle va réussir ? Ce n’est pas certain. »
— Abdel Hani
L’ARIB, par sa présence de proximité, entend jouer un rôle de médiateur attentif et constant, dans une période charnière pour l’avenir de la Bourgogne. En mettant les habitants au centre de son action, l’association souhaite que la transformation du quartier soit aussi celle des liens sociaux et du respect des histoires individuelles.