Face à la recrudescence des accidents de la route, le préfet des Landes a annoncé une mesure radicale : la suspension du permis pour tout conducteur surpris avec un téléphone au volant. Une décision inédite qui suscite autant d’approbations que de critiques.

Une décision inédite
À partir du 1er novembre, les conducteurs pris en flagrant délit d’utilisation du téléphone au volant dans les Landes risqueront la suspension de leur permis. Le préfet Gilles Clavreul a décidé de recourir à l’article L224-7 du Code de la route, qui autorise le représentant de l’État à suspendre un permis de conduire pour une durée maximale de six mois.
Jusqu’ici, cette infraction était punie d’une amende de 135 euros et d’un retrait de trois points. Désormais, les automobilistes s’exposent à une sanction immédiate et bien plus lourde.
Une phase pédagogique avant la répression
Le dispositif sera déployé en deux temps. Dès octobre, une phase de sensibilisation sera menée avec les forces de l’ordre afin d’alerter les automobilistes sur ce changement. Mais à compter du 1er novembre, la sanction tombera.
Le préfet justifie cette décision par un constat alarmant : le nombre de décès sur les routes landaises est en hausse. Seize personnes ont perdu la vie depuis le début de l’année, contre onze à la même période en 2021.
Un fléau dénoncé depuis des années
Pour les associations de sécurité routière, cette mesure répond à un danger largement sous-estimé.
« On n’est pas du tout étonné de cette décision parce qu’on dénonce depuis déjà plusieurs années le fait que l’usage du téléphone au volant devient un fléau », explique Pierre Lagache, vice-président de la Ligue contre les violences routières.
« On a des comportements qui se sont fortement dégradés et on a surtout une sous-estimation du risque lié à la communication au téléphone et à l’usage des SMS. C’est un facteur de risque extrêmement important qui est comparable à celui de l’alcool. »
Selon les chiffres de la Sécurité routière, en 2023, un défaut d’attention a été identifié dans 24 % des accidents corporels en France, causant la mort de 390 personnes.
Des critiques sur la proportionnalité
La mesure n’est toutefois pas accueillie unanimement. Pour certains spécialistes du droit routier, elle paraît disproportionnée.
« Vous allez avoir une suspension du permis de conduire de 6 mois pour une faute aussi légère, entre guillemets. Je crois qu’il faut expliquer en quoi le téléphone portable est peut-être dangereux plutôt que de réprimer », estime Jean-Baptiste Josca, avocat et porte-parole de l’association 40 millions d’automobilistes, interrogé sur RTL.
Cette inquiétude rejoint celle de nombreux automobilistes, qui redoutent une sanction jugée trop sévère, alors que les usages numériques se sont banalisés.
Les chiffres qui inquiètent
Depuis janvier 2025, les forces de l’ordre ont déjà verbalisé 3 163 conducteurs dans les Landes pour usage du téléphone au volant. À l’échelle nationale, cette infraction est devenue l’une des principales causes d’inattention, au même titre que l’alcool ou la vitesse.
Pour la préfecture, il ne s’agit plus de sensibiliser mais de marquer un tournant. « Le temps de la pédagogie est terminé », estime-t-on, rappelant que chaque vie perdue sur la route est une de trop.
Une expérimentation appelée à s’élargir ?
Présentée comme une « expérimentation », la décision pourrait faire école ailleurs si les résultats s’avèrent concluants. L’objectif affiché est clair : faire reculer l’usage du téléphone au volant et réduire le nombre d’accidents.
Reste à savoir si ce durcissement de la répression permettra de modifier durablement les comportements des conducteurs ou s’il accentuera les tensions entre usagers et autorités.