Alors que les moteurs PureTech du groupe Stellantis cristallisent critiques et inquiétudes, un professionnel de terrain invite à rétablir un climat de confiance entre constructeurs, garagistes et automobilistes.

Un gérant d’atelier automobile déplore les conséquences d’un climat de défiance généralisée envers les moteurs PureTech, mis en cause pour des défauts techniques. Il appelle à ne pas céder à la stigmatisation des marques françaises, en particulier Peugeot et Citroën, et à reconnaître les efforts de réparation engagés.


« Il faut arrêter de tout noircir. » Julien Décamps, gérant d’un garage Peugeot en activité depuis plus de quinze ans à Vitry-en-Artois, n’élude pas les problèmes. Mais il refuse les amalgames et défend une autre lecture du dossier PureTech. Pour lui, la crise de confiance en cours menace l’ensemble d’une filière déjà fragilisée.


L’impact silencieux d’une crise technique

Depuis plusieurs mois, le moteur PureTech, produit phare du groupe Stellantis lancé en 2012, fait l’objet d’une vive contestation. La pièce en cause : une courroie de distribution immergée dans l’huile, censée réduire les frictions et donc les émissions de CO₂. Une innovation technique qui s’est révélée problématique : au fil du temps, la courroie peut se désagréger, envoyant des particules dans le circuit de lubrification et causant des dommages parfois irréversibles au moteur.

Deux rappels ont été opérés en 2020 et 2022 par Stellantis, concernant plusieurs centaines de milliers de véhicules, notamment dans les marques Peugeot, Citroën et Opel. En parallèle, une action collective a été lancée par un collectif de consommateurs, dénonçant l’absence de prise en charge de nombreux cas pourtant similaires.

Pour autant, sur le terrain, tous les professionnels ne dressent pas un tableau aussi sombre. À Vitry-en-Artois, Julien Décamps n’a pas vu l’activité décliner. Mais il observe un phénomène plus diffus, et potentiellement plus dangereux à long terme : la perte de confiance.

« On n’a pas vu l’activité baisser, mais le doute s’installer chez nos clients. »


Réparations, remboursements : une réponse jugée sous-estimée

Le gérant local ne conteste pas les défaillances. Mais il souligne ce qu’il considère comme une forme d’oubli médiatique : la réaction du constructeur. Dès l’identification du problème, assure-t-il, un cadre de prise en charge a été mis en place pour les clients concernés.

« Dès le début, dès que la marque a eu connaissance des problèmes, il y a eu des remboursements à 100 % si vous entriez dans le cadre. »

Ce cadre, précise-t-il, reposait sur deux critères : un entretien régulier chez un garagiste agréé et un kilométrage conforme aux préconisations. Pour les situations hors cadre, des recours ont été possibles via des dossiers relation clientèle.

« Certains clients ont obtenu 60, 70 % de remboursement, selon les cas. »

Depuis janvier 2022, Stellantis a mis en place une plateforme spécifique pour traiter les litiges restants, ouverte jusqu’en mars 2024. Elle vise les conducteurs ayant engagé des frais hors du programme initial, dans une logique de régularisation élargie.


Une crise révélatrice des rapports entre marques et terrain

Ce que Julien Décamps redoute, au-delà du cas PureTech, c’est une rupture durable entre les clients et leur réseau de proximité.

« Le problème, c’est que dès qu’on dit PureTech, on dit “moteur en panne”, alors que beaucoup de clients n’ont jamais eu de souci, ou en ont eu, mais ont été pris en charge. »

Il estime que ce climat de méfiance nuit à l’ensemble du réseau d’entretien et de réparation, pourtant en première ligne pour expliquer, diagnostiquer, rassurer.

Dans son atelier, qui emploie six personnes, le garagiste tient à rétablir un lien basé sur l’écoute et la transparence : « Ce qui nous protège, c’est la proximité. Les clients viennent, parlent, posent des questions. C’est là qu’on peut rétablir la vérité des faits. »

« Ayez confiance en votre garagiste, en notre proximité. »


Une industrie locale concernée en profondeur

La région Hauts-de-France n’est pas neutre dans l’économie automobile française. Le site Sevelnord, situé à Hordain (Nord), produit notamment des utilitaires et monospaces pour Stellantis. Près de 2 400 salariés y travaillent, auxquels s’ajoutent les sous-traitants et les réseaux de vente et d’entretien.

Une détérioration durable de l’image des marques françaises pourrait avoir des répercussions directes sur l’ensemble de cette chaîne.

« Si on continue comme ça, on va droit dans le mur. Ce n’est pas juste une affaire d’image. C’est une question d’emplois, de territoire, d’avenir industriel. »


Un moteur déjà modifié et des perspectives rassurantes

Selon les données internes au groupe Stellantis, seuls 7 % des moteurs PureTech en circulation seraient concernés par la défaillance. Depuis fin 2022, les nouvelles versions du moteur ont été modifiées : la courroie a été abandonnée au profit d’une chaîne de distribution, solution plus classique et éprouvée.

Le constructeur affirme également avoir revu ses processus de fabrication et de surveillance, notamment via l’intelligence artificielle pour mieux anticiper les défaillances.

D’autres constructeurs, comme Volkswagen ou Ford, ont également connu des rappels massifs ces dernières années. Pour Julien Décamps, cela devrait inciter à relativiser : « Des problèmes de conception, il peut y en avoir partout, dans toutes les marques. »


Vers un retour progressif de la sérénité ?

Le garagiste l’admet : les critiques ont leur raison d’être. Mais il invite à sortir d’une logique binaire, où un défaut devient automatiquement synonyme de scandale généralisé.

Son souhait : que les clients ne renoncent pas à consulter leur garagiste de confiance pour un sujet vu sur les réseaux ou relayé dans la presse sans vérification.

« Ce que je dis, c’est : informez-vous, venez en parler. On n’a rien à cacher, on veut juste continuer à bosser sereinement, pour vous. »

Le retour de la confiance passe, selon lui, par une parole professionnelle assumée, mais aussi entendue.

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