Alors que plus de 80 % des départements français sont déjà colonisés, la métropole lilloise reste jusqu’ici en marge. Mais les autorités sanitaires multiplient les surveillances et les campagnes d’information face à un insecte dont l’installation paraît inévitable.

Une vigilance renforcée dans la métropole
Dans le quartier du Vieux-Lille, des techniciens spécialisés inspectent discrètement les rues, posant des pièges aux abords des habitations. Objectif : détecter la présence du moustique tigre, également appelé Aedes albopictus. Pour l’heure, aucun signalement confirmé n’a encore été recensé dans la capitale des Flandres. Mais les autorités régionales insistent, la situation est suivie de très près.
« On est en sursurveillance à Lille », rappelle François-Xavier Sommelet, responsable régional d’Altopictus, société mandatée par l’Agence régionale de santé.
Avec plus de 300 pièges installés dans le Nord et le Pas-de-Calais, la région fait figure de zone sous observation permanente. Les résultats des prélèvements sont examinés au microscope afin de confirmer ou d’infirmer la présence du nuisible.
Une espèce envahissante difficile à contenir
Le moustique tigre a fait son apparition en France en 2004, à Menton, avant de progresser inexorablement vers le nord. Aujourd’hui, 81 départements sont colonisés. L’insecte, originaire d’Asie, s’adapte parfaitement au climat européen et supporte des hivers rigoureux.
« Les œufs peuvent survivre à des températures descendant jusqu’à -10 °C », explique un spécialiste. « Il est extrêmement résistant et quasiment impossible à éradiquer. »
À la différence du moustique commun, qui prolifère dans les zones humides, le moustique tigre affectionne particulièrement les zones urbaines et pavillonnaires. Il se déplace peu, rarement au-delà de 150 mètres, mais colonise progressivement les agglomérations par le biais des transports et des flux humains.
Des risques sanitaires réels mais mesurés
L’inquiétude autour du moustique tigre ne tient pas seulement à son caractère envahissant. Il est également vecteur potentiel de maladies comme la dengue, le chikungunya ou le virus du Nil occidental. En 2024, plusieurs foyers autochtones de chikungunya avaient été recensés dans le sud de la France.
Pour les habitants, la nuisance la plus courante reste toutefois les piqûres répétées, surtout en période estivale. « Dans les zones colonisées, les plaintes concernent bien davantage l’inconfort quotidien que la peur des maladies », constatent les techniciens.
Lille, une exception appelée à disparaître
La métropole lilloise fait figure de bastion. Elle est aujourd’hui la dernière grande ville française de plus de 200 000 habitants encore épargnée. Mais pour les experts, ce n’est qu’une question de temps.
« La région est prise en étau, entre la remontée du sud par l’Île-de-France et la présence de l’espèce en Belgique », explique un technicien. « Sa colonisation est inéluctable. »
Certains foyers ponctuels ont déjà été détectés dans le Nord, à Saint-Saulve ou Salomé, et à Lille même, dans le quartier de Saint-Maurice Pellevoisin. Aucun cas n’a en revanche encore été recensé dans le Pas-de-Calais.
Ports, aéroport et particuliers mobilisés
Pour prévenir l’arrivée massive de l’insecte, plusieurs sites stratégiques font l’objet d’une attention particulière : l’aéroport de Lesquin, mais aussi les ports de Dunkerque, Boulogne et Calais, avec leurs dizaines de pièges installés. Les particuliers sont également appelés à la vigilance : chacun peut signaler la présence suspecte d’un moustique tigre via le site de l’Agence nationale de sécurité sanitaire (ANSES).
« 80 % des moustiques se trouvent chez les particuliers », soulignent les professionnels. « La lutte passe donc avant tout par les habitants, en supprimant les eaux stagnantes dans les jardins ou sur les balcons. »
Un enjeu de santé publique durable
Les autorités rappellent que l’arrivée du moustique tigre ne pourra être empêchée. L’enjeu réside désormais dans le ralentissement de sa progression et dans l’adaptation des comportements pour limiter les nuisances. Campagnes de sensibilisation, démoustication ponctuelle et suivi scientifique renforcé sont autant de leviers mobilisés.
Si Lille et sa métropole bénéficient encore de quelques mois de répit, les habitants sont d’ores et déjà appelés à se préparer. Connaître les bons gestes, supprimer les points d’eau stagnante et signaler toute suspicion de présence constituent les moyens les plus efficaces pour retarder une colonisation annoncée.