Leur application « Robin des Ronds » pour le remboursement des SMS surtaxés est au cœur d’un litige commercial avec la première chaîne française
Face au refus de TF1 de diffuser leur publicité, Simon Dubreu et Patrick Cocheteux, créateurs de l’application « Robin des Ronds », engagent une procédure judiciaire. Ils dénoncent un refus de vente qu’ils jugent infondé, et espèrent par ce procès défendre aussi les droits des participants aux jeux-concours télévisés.

Une innovation au service des consommateurs
Depuis son lancement en septembre 2023, l’application « Robin des Ronds » se donne pour mission de faciliter le remboursement des frais engagés lors des participations aux jeux-concours utilisant des SMS surtaxés. Ce service, imaginé par deux autoentrepreneurs de Nieppe, entend lever les nombreux obstacles administratifs qui découragent les consommateurs de faire valoir leurs droits.
Selon la loi française, la participation à de tels jeux-concours doit être gratuite. En pratique, pour obtenir le remboursement des frais de SMS ou d’appels surtaxés, les participants doivent envoyer plusieurs documents par courrier postal : facture téléphonique, relevé d’identité bancaire, copie de carte d’identité et justificatif de domicile. Une procédure lourde et fastidieuse, qui freine la majorité des utilisateurs.
Avec « Robin des Ronds », tout s’automatise : la plateforme génère les courriers de demande et prend en charge leur envoi. En contrepartie, elle demande une participation forfaitaire couvrant les frais de traitement, sans prélever de pourcentage sur les remboursements obtenus.
« Notre but est de démocratiser l’accès au remboursement. Beaucoup ignorent qu’ils peuvent récupérer cet argent ou abandonnent face aux démarches complexes », explique Simon Dubreu.
Une croissance régulière, mais un besoin de visibilité
Depuis sa création, l’application a permis de rembourser près de 11 000 euros à ses utilisateurs, avec une progression moyenne de 50 nouveaux inscrits chaque mois. Encouragés par ces débuts prometteurs, Simon Dubreu et Patrick Cocheteux souhaitent donner plus d’ampleur à leur projet.
En mai dernier, ils élaborent un spot publicitaire, financé avec l’aide d’un investisseur, pour un budget estimé à 50 000 euros. L’objectif : diffuser ce message à grande échelle, notamment à travers les antennes de grands groupes audiovisuels. TF1, première chaîne nationale, apparaît alors comme une cible prioritaire.
Cependant, l’enthousiasme initial laisse place à la déception. Après un premier contact avec le service commercial de TF1, les deux entrepreneurs essuient un refus.
« Lors de l’échange, il y a eu un moment de silence. Puis, quelques jours plus tard, on nous a signifié que notre publicité serait rejetée car elle dénigrerait leurs activités », rapporte Simon Dubreu.
Les créateurs de « Robin des Ronds » modifient leur spot pour éviter toute référence problématique, mais ne reçoivent aucune suite. Après deux courriers de mise en demeure restés sans réponse, ils décident de porter l’affaire devant le tribunal de commerce de Paris.
Le refus de vente au cœur du litige
Le fondement de leur action repose sur la notion de « refus de vente injustifié ». En droit commercial, refuser de vendre un service ou de traiter avec un client sans motif légitime peut constituer une infraction. Or, selon les plaignants, TF1 ne justifie pas clairement son refus, même après les modifications apportées à leur publicité.
« Nous estimons que TF1 ne peut pas écarter arbitrairement une publicité qui respecte les règles en vigueur, surtout quand elle défend les droits des consommateurs », plaide Patrick Cocheteux.
Pour le tribunal, il s’agira d’apprécier la réalité de la justification avancée par TF1, ainsi que l’éventuelle atteinte à ses intérêts commerciaux. La procédure, désormais engagée, suit son cours. Une fois les échanges de pièces et arguments finalisés entre les parties, le juge disposera d’un délai maximal d’un an pour rendre sa décision.
Un combat au-delà de leur cas personnel
Au-delà de leur situation particulière, Simon Dubreu et Patrick Cocheteux souhaitent mettre en lumière un problème plus large : celui de la transparence autour des jeux-concours et des frais réels engagés par les participants. Pour eux, leur application incarne une tentative de rééquilibrage face à des pratiques commerciales parfois opaques.
Dans les dernières années, plusieurs associations de consommateurs ont déjà pointé les dérives liées aux jeux télévisés, notamment en matière de coûts cachés ou de conditions de remboursement peu accessibles.
Selon un rapport de l’Autorité de Régulation de la Communication Audiovisuelle et Numérique (Arcom) de 2022, près de 70 % des participants aux jeux-concours par SMS ignorent leur droit au remboursement. Moins de 5 % entament effectivement une démarche pour le faire valoir.
« Nous ne sommes pas contre les jeux télévisés. Mais nous voulons que les règles soient respectées et connues de tous », insiste Simon Dubreu.
Les perspectives pour « Robin des Ronds »
Quelle que soit l’issue de ce procès, les deux autoentrepreneurs entendent poursuivre leur développement. Ils envisagent d’élargir leur service à d’autres types de remboursements peu sollicités, comme ceux liés aux achats en ligne ou aux promotions commerciales.
En parallèle, ils renforcent leur présence numérique, misant sur les réseaux sociaux pour contourner les obstacles rencontrés dans les circuits traditionnels de diffusion. Le procès contre TF1, quant à lui, pourrait donner un écho médiatique inattendu à leur projet.
Alors que le marché des jeux-concours par SMS reste très lucratif pour les chaînes de télévision et les opérateurs télécoms, « Robin des Ronds » entend incarner une alternative citoyenne, en facilitant l’accès effectif aux droits des consommateurs.