Une décision du Conseil supérieur de la magistrature a confirmé le déplacement d’office de Philippe Sabatier, magistrat en poste depuis plus de dix ans à Boulogne-sur-Mer. Une vingtaine de femmes ont dénoncé son comportement jugé intrusif et insistant.

Une décision qui secoue la juridiction boulonnaise
Le Conseil supérieur de la magistrature (CSM) a rendu publique, le 1er juillet, une décision lourde de conséquences pour Philippe Sabatier, procureur adjoint à Boulogne-sur-Mer depuis plus d’une décennie. Ce magistrat expérimenté, en poste depuis 19 ans dans la magistrature, a été sanctionné par un « déplacement d’office ».
La décision intervient après une enquête administrative ouverte à la suite de plusieurs signalements pour comportements inappropriés. D’après les conclusions du CSM, il s’agit de regards équivoques, mais aussi de courriels et de SMS répétés, adressés de manière systématique à de nombreuses femmes travaillant au sein de la juridiction boulonnaise.
Une vingtaine de femmes concernées
Selon les éléments de la procédure, environ vingt femmes auraient été visées par ces sollicitations. Parmi elles figuraient des greffières, des assistantes de justice, des magistrates, mais aussi une partie civile dans le cadre d’une audience où Philippe Sabatier représentait le ministère public.
Ces comportements ont conduit à une accumulation de témoignages, étalés sur plusieurs années, et qui ont pesé dans la décision du CSM.
« Des regards équivoques, courriels et SMS intrusifs adressés de manière systématique et à un très grand nombre de jeunes femmes de la juridiction », souligne le Conseil supérieur de la magistrature dans sa décision.
Des messages insistants
L’enquête révèle notamment le cas d’une assistante de justice qui a reçu près de quarante SMS entre octobre 2019 et septembre 2020. Face à la répétition de ces sollicitations, la jeune femme a finalement dû prendre un arrêt maladie.
Le CSM estime que l’intéressé a adopté un « comportement confinant au harcèlement », malgré les refus exprimés par les femmes sollicitées.
La défense de Philippe Sabatier
L’avocate du procureur adjoint, Me Fabienne Roy-Nansion, reconnaît que son client admet les faits mais nuance leur portée. Elle affirme qu’il n’y a jamais eu de gestes déplacés ou de propos ouvertement grivois.
« Il pouvait être parfois insistant. Mais ce n’était ni grivois ni d’ordre intime. Il pouvait dire qu’une femme avait une belle chevelure ou une belle robe », a expliqué l’avocate.
Cette défense, bien que reprenant les arguments de l’intéressé, n’a pas empêché le CSM de trancher en faveur d’une sanction disciplinaire.
Aucune plainte au pénal déposée
Malgré l’ampleur des témoignages et la gravité des faits reprochés, aucune plainte pénale n’a été déposée contre Philippe Sabatier. La procédure est restée sur le terrain disciplinaire, au sein de l’institution judiciaire.
L’intéressé ne reprendra donc pas ses fonctions à Boulogne à la rentrée. À compter du 1er septembre, il sera affecté dans une autre juridiction, située en dehors du ressort de la cour d’appel de Douai.
Une affaire révélatrice
Cette affaire met en lumière les difficultés que peuvent rencontrer certaines juridictions face à des comportements jugés inappropriés dans leurs rangs. Si la procédure a duré plusieurs années, le Conseil supérieur de la magistrature a finalement estimé que le maintien en poste du magistrat à Boulogne était incompatible avec le bon fonctionnement de la juridiction.